Selon toutes vraisemblances, le rêve des partisans de hockey de Québec sera réalisé sous peu. Ils retrouveront leurs Nordiques adorés ! Après un long chemin semé d'embûches de toutes sortes. Après des péripéties qui les auront fait passer par toute la gamme des émotions. Après la "marche bleue" qui a rassemblé entre 50 000 et 60 000 personnes sur les plaines d'Abraham, il y a cinq ans. Après l'engagement de milliers de partisans qui ont payé pour réserver leurs sièges dans le nouvel amphithéâtre de Québec par l'intermédiaire de "J'ai Ma Place". Après l'avènement du groupe de pression populaire de la Nordiques Nation (photo ci-dessus) qui s'est fait voir et entendre aux quatre coins de l'Amérique. Après la saga de la loi 204 qui sauvait le projet de construction du nouvel amphithéâtre d'une contestation en cour de justice.
Lorsqu'on annoncera l'heureux dénouement, il n'y a pas de doute que toute la ville et pratiquement tout l'Est du Québec seront en liesse ! Comme à Winnipeg, il y a quatre ans, quand les gens du Manitoba ont retrouvé leurs Jets. Mais contrairement à la richissime famille Thomson qui a ramené le hockey de la LNH à Winnipeg en rachetant la franchise des Thrashers d'Atlanta pour 170 millions de dollars, les nouveaux propriétaires des Nordiques (Québecor) devront payer le gros prix pour un club d'expansion de la LNH. Ce qui est très décevant et injuste. Surtout après que des Canadiens aient racheté de la LNH, il n'y a pas très longtemps et pour 170 millions de dollars également, les Coyotes de Phoenix pour les garder en Arizona au lieu de les transférer à Québec, où ils auraient été accueillis à bras ouverts.
Pour le nouveau club de Québec, on parle en effet d'une somme colossale avoisinant les 700 millions de dollars canadiens, si le huard continue de s'effondrer comme il le fait depuis un an ou deux. La chute de notre petro-dollar se poursuit au même rythme que le prix du baril de pétrole, dont les réserves n'ont jamais aussi été élevées depuis près de 80 ans ! Notre pauvre monnaie se dirige dangereusement vers les 70 cents U.S.. Le ralentissement économique mondial, surtout en Chine, rend nos ressources naturelles encore moins attrayantes sur les marchés. De plus, la Banque Fédérale Américaine (FED) envisage de hausser son taux d'intérêt de base dans les prochaines semaines. Contrairement à la situation économique fragile des autres pays du globe, ça va plutôt bien chez l'Oncle Sam. La hausse des taux d'intérêt va renforcer encore plus la devise américaine par apport à celles des autres pays, dont le Canada.
Dans ce contexte, Québec a-t-elle les moyens de se payer et de supporter un club de milliardaire ? Il faut dire que l'économie de la région de Québec se porte quand même très bien avec un taux de chômage qui est le 2e plus bas au Canada. Elle est une des rares régions qui a pu traverser de façon presque indemne la grande récession de 2008-2009. Son économie, bien plus diversifiée qu'autrefois, a le vent dans les voiles. Et la construction du nouvel amphithéâtre a donné confiance aux amateurs de hockey de Québec qu'ils retrouveraient bientôt leur club préféré. Le nouveau bâtiment, imposant et multifonctionnel, crée également une autre opportunité pour un développement urbain qui sera le bienvenu, surtout quand on regarde les environs (photo ci-dessus) pas très "chics" de cet édifice baptisé "Centre Vidéotron". Ce coin-là a un grand besoin de revitalisation...
Vu le montant astronomique que vont coûter les nouveaux Nordiques, il est peu surprenant que Québecor ait demandé l'aide d'autres investisseurs pour acquérir la franchise. Étant donné le prix exorbitant et les risques qu'un petit marché comme Québec peuvent entraîner, les seuls qui voudront se lancer dans l'aventure seront probablement des acteurs institutionnels du secteur public. On pense à la Caisse de Dépôt du Québec, à Investissement Québec, ou aux fonds de travailleurs comme la CSN et la FTQ. À Québec, les compagnies d'assurance sont en force. Ce serait bien qu'au moins une de celles-ci -ou un consortiun- contribue à l'achat du club des nouveaux Nordiques. On ne sait jamais, mais c'est improbable...
Il n'en reste pas moins que Québec aura quand même son équipe de la LNH puisque tout a été fait pour qu'il en soit ainsi. On la voulait à tout prix...et c'est ce qui arrivera. La pression est trop forte sur les autorités de la Ligue, car toutes ses exigences ont été satisfaites : un nouvel amphithéâtre répondant à ses normes, des propriétaires aux poches profondes, et des clients-partisans prêts à payer des billets à fort prix. Avec cette manne qui tombera dans les coffres de la LNH, le commissaire Gary Bettman (photo ci-dessus) sera content de faire de généreux chèques, d'environ 35 millions de dollars à chacune des autres franchises de son circuit.
Plusieurs concessions, moins bien nanties, accueilleront ces millions avec joie et soulagement. Même l'analyste anti-Québécois Don Cherry est en faveur du retour des Nordiques ! Et les propriétaires du Canadien de Montréal aussi...quoique j'ai hâte de voir s'ils ne voteront pas contre Québec, comme ils l'ont fait la première fois, en 1979, quand les Nordiques sont passés de l'AMH à la LNH. On s'en souvient trop bien, dans la cité de Champlain. Ce qui a sans doute contribué à attiser la haine du Canadien que l'on a toujours nourrie chez les fans des Nordiques. Du moins chez les vrais fidèles du Fleur de Lysé, qui ont refusé de virer leur capot de bord, et d'appuyer les Cannes à CHiens, quand le gros profiteur à Marcel Aubut a vendu les "Nords" en 1995.
Même si à l'époque de la Marche Bleue, Gary Bettman avait dit que les déménagements des Jets, en 1996; et des Nordiques, en 1995; avaient été des erreurs et des injustices; qu'il fallait corriger; j'ai eu longtemps des doutes au sujet du retour d'une franchise de la LNH à Québec. C'est que monsieur le commissaire affichait nettement ses préférences envers des marchés bien plus "appétissants". Entre autres, celui de la clinquante Las Vegas, et celui -inoccupé- de Seattle, dans le nord-ouest des USA.
Vegas n'avait besoin que d'un aréna neuf et d'une démonstration d'intérêt de la part d'éventuels acheteurs de billets de saison. On avait déjà un propriétaire riche à craquer en la personne du multimilliardaire Bill Foley.
Bettman a rencontré le maire de Seattle pour qu'il mette de l'avant un projet de construction d'aréna. Et il a cherché à susciter une surenchère pour un club dans la ville des émeraudes. Mais ça n'a pas fonctionné. Sans doute à sa grande déception. Deux nouvelles équipes dans l'Ouest auraient automatiquement rééquilibré le nombre de clubs par rapport à la Conférence de l'Est (16 équipes dans l'Est et autant dans l'Ouest). Alors, malgré son excellente candidature, Québec aurait très bien pu rester dehors, à la porte... J'ai du mal à croire que la LNH puisse dépasser le nombre de 32 clubs. Même la toute puissante NFL n'en a pas plus. Québec aurait probablement dû attendre un transfert d'une franchise désaffectée ou en difficulté de la Conférence de l'Est. Comme les Panthers de la Floride ou les Hurricanes de la Caroline.
En enclenchant le présent processus d'expansion (pas encore sûr à 100% qu'il y en aura une, selon les autorités de la LNH) Bettman et ses acolytes avaient lancé des invitations à pas moins de seize groupes susceptibles d'être intéressés à entrer dans la grande Ligue. Seulement deux ont répondu à leur appel. Ce qui a manifestement choqué le commissaire et...ouvert la voie à Québecor et à la ville de Québec. Il faut dire que chaque invitation comportait le dépôt d'une somme de dix millions de dollars dont deux millions non remboursables. Mieux valait être certains de son affaire avant de répondre positivement à l'appel d'offres des gens de la LNH. La réponse des représentants de la Ligue a été assez sèche. Selon eux, ils ne suffit pas d'espérer ou de vouloir aspirer à l'obtention d'une franchise de la LNH pour effectivement convaincre les autorités de la Ligue de leur en accorder une. Il faut être plus sérieux que ça. "Show us the money" aurait pu résumer les bonzes du circuit Bettman...
La démarche d'expansion de la LNH est maintenant rendue à l'étape de la démonstration de la capacité des villes de Las Vegas et de Québec de soutenir et de faire vivre un club de hockey professionnel. Pour Bill Foley, ce n'est qu'une formalité, mais pour Québecor les calculs sont plus compliqués. La dévaluation du dollar canadien menace à court et à moyen terme la rentabilité d'un club à Québec. Avant même que le huard perde des plumes, le Conference Board du Canada avait estimé que le marché de la région de Québec était tout juste assez fort pour supporter d'éventuels nouveaux Nordiques. Il est vrai que le marché des devises monétaires fluctue et que la valeur du dollar canadien peut très bien remonter. De plus, la Ligue Nationale a maintenant un système de péréquation pour aider les équipes moins favorisées. Elle peut aussi ajuster le plafond -et le plancher- salarial. Mais disons qu'il aurait été préférable qu'elle soit moins gourmande en fixant le prix de ses nouvelles franchises. D'après la revue d'économie FORBES, la valeur moyenne d'un club de la NHL se situe présentement aux environs de 350 millions de dollars. Vingt des trente équipes actuelles valent moins que les 500 millions demandés à Vegas et à Québec.
Est-ce que Gary Bettman a voulu profiter de la passion exceptionnelle des amateurs de hockey de Québec pour leur demander la lune en échange d'un club d'expansion ? Possible... Aussi, quand il se présentera dans la ville du maire Régis Labeaume pour le premier match des nouveaux Nordiques, Bettman va être accueilli comme partout ailleurs dans les autres villes de son circuit. C'est-à-dire, qu'il aura droit à des huées bien senties...
1 commentaire:
Très intéressant comme article, mais j'aimerais rappeler ce qui arrive aux nouvelles équipes qui tentent de s'installer dans la LNH. Les Whalers de Hartford ont commencé leur déclin par leur défaite en 7 matches contre les Canayens en 1992. À ce qu'il parait, un des buts du torchon n'aurait pas du compter: il y avait une infraction laquelle a été ignorée par l'arbitre.
Pour les Nordiques par besoin d'aller bien loin: le but d'Alain Côté encore une autre occasion où un arbitre corrompu a favorisé cette horrible équipe. D'ailleurs, il est possible de se demander si Fraser n'a pas magouillé contre les Leafs en 1993 (punition non décernée à Gretzky, une série toute Canadienne entre TOR et mtl n'aurait pas été payante pour la LNH $$$.
C'est inutile d'augmenter le nombre de clubs et de favoriser quelques un, je ne me demande plus pourquoi les Américains se désintéressent de ce sport.
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